Vendredi 24 mars dernier, Iliman Ndiaye a marqué son premier but avec le Sénégal, large vainqueur du Mozambique. Un moment de pur bonheur pour l’attaquant de Sheffield (D2 Anglaise) qui a communié avec les supporters présents au stade Abdoulaye Wade. Nouvelle coqueluche du public sénégalais, le natif de Rouen rêve depuis tout petit de représenter le Sénégal, le pays de son père qu’il a découvert à l’âge d’un an lors d’un voyage familial en 2001. C’est son grand-père qui, en premier, lui met un ballon dans les pieds. Depuis, il en fait des tours de magie.
Des Sapins de Rouen à l’OM, sous l’œil de Papa
Né à Rouen le 6 mars 2000, Iliman Ndiaye est très vite inscrit par son papa au club de Rouen Sapins FC. Il n’avait alors que 4 ans et il était déjà évident qu’on avait un futur crack dans ses rangs dans le club rouennais. En novembre 2022 dans les colonnes de France 3 Normandie, Hassan Talani raconte : « Dès son plus jeune âge, il sortait du lot. Il avait un don mais en plus il travaillait en dehors des entraînements avec son papa. C’était un vrai guerrier qui ne lâchait jamais rien sur le terrain », a révélé celui qui l’a entraîné quelque temps au club des Sapins.
En 2009, il atterrit au FC Rouen. Il ne reste qu’une année chez les Diables rouges. Direction, le centre de préformation de l’Olympique de Marseille. Iliman adorait le football. Au point de fondre en larmes dans les bras de son père à la fin d’un entraînement qui s’est trop vite terminé au goût du petit garçon, raconte Coach Talani. Depuis ses touts débuts, Iliman Ndiaye est accompagné par son papa, qui poste ses exploits techniques sur YouTube. À la veille de ses 10 ans, il est champion national de futsal avec le trophée de meilleur joueur du tournoi national à Paris.
Le prodige débarque à Dakar Sacré-Cœur
En 2014, Iliman déménage à Dakar. À Cambérène, pendant deux ans chez la sœur de son père, il devient un footballeur sénégalais à part entière. C’est au club de Dakar Sacré-Cœur qu’il va poursuivre sa formation. D’emblée, il impressionne l’encadrement par une technique hors du commun. « Il avait déjà les bases naturelles de ce que l’on inculque à nos joueurs. En arrivant à Dakar Sacré-Cœur, il avait des qualités intrinsèques dans les prises de balle, les passes et le positionnement sur le terrain. Il aimait ce qu’il faisait. Tactiquement, on appréciait beaucoup le petit Iliman parce qu’il était en avance sur les joueurs de son âge », a confié Hassane Fall, son entraîneur à DSC.
Sa finesse technique en a ébloui plus d’un à Dakar Sacré-Cœur. « Ses principales qualités c’est sa technique de prise de balle. Il savait utiliser toutes les parties licites du corps pour contrôler le ballon. Mais sa grande force c’est le dribble. Il nous surprenait franchement. Quelque soit la taille du joueur en face ou qu’il soit seul contre deux adversaires, il parvenait toujours à s’en sortir et avec une fière allure. Bien sûr, il ne se moquait pas de ses adversaires, il n’en rajoutait pas mais il faisait ce qu’il devait faire pour se sortir d’une situation délicate. Il n’hésitait pas à servir les autres même si on voyait que c’était un buteur né. Comme c’est un bon dribbleur, il se retrouvait bien souvent devant les buts et en profitait pour faire briller ses coéquipiers », a expliqué Hassan Fall, aujourd’hui entraîneur de l’équipe première de DSC.
Son talent saute aux yeux de tous. Au point de susciter la curiosité d’autres parents qui faisaient le déplacement pour les matchs d’entraînement des U15 de Dakar Sacré-Cœur. « C’est un jeune joueur très correct et discipliné dans son jeu qu’on a vu débarquer au centre (…) Il était au-dessus de la norme à son âge. Lors des matchs, il y avait une foule immense de parents, de jeunes dont les discussions tournaient autour du petit Iliman Ndiaye qui est pétri de talent. Ils venaient juste pour le voir jouer. Ça faisait vraiment plaisir », s’est remémoré Coach Hassan Fall.
La touche africaine en complément
Sa préformation française était indéniablement un atout face à des joueurs qui ont commencé bien plus tard dans les structures comme Dakar Sacré-Cœur. Mais, il manquait à Iliman cette petite touche exotique. « Sur le terrain, il avait un fort caractère avec beaucoup de détermination. C’est le joueur modèle qu’on rêve tous d’entraîner. Il avait ses bases mais il a fallu qu’on lui ajoute un petit peu ce côté africain qu’il appréciait déjà chez ses coéquipiers. Il s’est vite fait des amis en se mettant aux dialectes et codes de ses partenaires », a reconnu Hassan Fall.
Malgré son jeune âge, Iliman était déjà conscient des efforts à faire pour s’épanouir dans ce nouvel environnement « C’était un enfant très sociable. Il aimait se mélanger aux autres et ne faisait aucune distinction avec les autres enfants. À ses débuts, on l’emmenait à l’entraînement en voiture. Puis il venait seul en taxi. Un jour, il me dit : Coach, je suis venu en « Ndiaga Ndiaye » (cars de transport en commun populaire de Dakar). Il voulait faire comme ses coéquipiers, alors que sa tante s’inquiétait poarce qu’il tardait à rentrer. Quand elle téléphonait pour me dire qu’il n’était toujours pas rentré, je lui rétorquais qu’il était en chemin mais qu’il ne prenait plus les taxis privés. Il aimait déjà cette simplicité malgré son jeune âge », a témoigné Coach Hassan Fall.
L’équipe du Sénégal dans le cœur
Iliman Ndiaye quitte Dakar Sacré-Cœur en 2016 pour rejoindre l’Angleterre. Le jeune homme de 16 ans essuie un à un les refus des centres de formation anglais. Sa persévérance finit par payer après son passage au Rising Ballers. Il intègre dans la foulée Boreham Wood, club de 5ème division anglaise. Tout bascule à l’été 2019 quand Sheffield United signe le prodige sénégalais chez ses U21. Le club retrouve alors l’élite anglaise le prête dans la foulée à Hyde United. Il dispute ses premières minutes en Premier League en mars 2021 contre Leicester. Les Blades sont relégués à l’issue de la saison. En Championship, Illiman Ndiaye s’affirme comme la pièce maîtresse des hommes de Paul Heckingbottom. 7 buts et 2 passes décisives en 23 titularisations. De quoi attirer l’attention du sélectionneur sénégalais.
En juin 2022, pour les matchs de qualification à la CAN 2023, Aliou Cissé convoque Iliman Ndiaye pour la première fois. Un rêve qui se réalise pour le franco-sénégalais. Contrairement à beaucoup de binationaux, il n’y a jamais eu d’hésitation pour le gamin de Camberène et Rouennais de naissance. « Il m’a toujours dit qu’il voulait jouer pour le Sénégal. C’était son rêve depuis tout petit et c’est amplement mérité ! Il a tout fait pour, il a toujours travaillé, il n’a jamais rien lâché et il est récompensé », s’était réjouit Hassan Talani à l’annonce de la liste d’Aliou Cissé pour la coupe du monde 2022.
Son choix de revêtir la tunique des Lions du Sénégal était fait dès le plus jeune âge. Son déménagement à Dakar et son passage de deux ans à DSC ont renforcé cet amour. « C’est une grande fierté pour nous les coachs, Dakar Sacré-Cœur, d’avoir contribué à la formation d’Iliman. C’est un réel plaisir de le voir sur les pelouses internationales et d’évoluer en équipe nationale. C’était son rêve de jouer pour le Sénégal, il le souhaitait ardemment. Il est loin d’avoir montré tout son potentiel. Je pense que d’ici quelque temps, on verra un Iliman encore plus mature. Espérons qu’il portera haut les couleurs des Lions », s’est réjoui Hassan Fall.
Sur la chaîne YouTube de Oh My Goal, Iliman répondait ceci : « Mon objectif ? La coupe du monde avec le Sénégal ! Depuis que je suis tout petit je me dis que je vais gagner la coupe du monde avec le Sénégal ». En attendant de décrocher une coupe du monde avec le Sénégal, Iliman vit son rêve de jouer pour les Lions de la Téranga.
Moustapha M. SADIO
