« Je suis exténué. Je commence à déprimer. Dieu seul sait si je vais retourner dans mon pays en vie ». Sur une chaise, derrière l’hôtel Arenah de Yaoundé où il a été expulsé pour « facture impayée », Alvin Zhakata s’accroche à son chapelet. Cela fait plusieurs jours que ce ressortissant zimbabwéen squatte à l’arrière de cet établissement situé au quartier Olembe, non loin du stade qui a accueilli l’ouverture et la finale de la CAN 2021 au Cameroun. « La situation est très difficile. Je sens mes forces qui me lâchent. Je prie tous les jours pour pouvoir rentrer chez moi », dit-il, la gorge nouée.
Entre deux phrases, le jeune homme de 35 ans marque un temps de silence, le regard vide, la mine abattue. Cela fait des jours qu’il a de la peine à bien se nourrir. Avec le temps, il a appris à supporter. Malgré son état de santé précaire : il a de problèmes respiratoires. Selon son carnet médical, Alvin Zhakata aurait une maladie pulmonaire qui n’a pas été clairement indiquée. Il a peur de ne jamais revoir sa famille. L’homme à la silhouette filiforme dort à la belle étoile, dans le froid. Et n’a pas pour seuls compagnons que des moustiques.
Au commencement était la CAN 2021
Alvin Zhakata est un consultant sportif zimbabwéen freelance. Il est arrivé au Cameroun avec une délégation de son pays, à la faveur de la Coupe d’Afrique des Nations 2021. Le groupe conduit par le secrétaire général du ministère zimbabwéen des sports, des arts et de la récréation a pris ses quartiers à l’hôtel Arenah de Yaoundé le 15 janvier. Le Zimbabwe qui était en effet logé dans le groupe B à Bafoussam devait disputer son dernier match au stade Ahmadou Ahidjo de Yaoundé trois jours plus tard. Malgré la victoire 2-1 contre la Guinée, les Warriors sont éliminés au premier tour. La délégation zimbabwéenne quitte le Cameroun le 22 janvier après avoir réglé toutes ses factures d’hôtel. Mais Alvin Zhakata choisit de rester pour vivre la finale prévue le 6 février.
Pénalités, facture impayée…
Seulement, le 27 janvier, le consultant sportif « a disparu de l’hôtel, laissant ses bagages dans la chambre. Après investigations, il sera repéré au Centre des urgences de Yaoundé », relate un employé de l’hôtel Arenah. Incapable de régler ses factures d’hôpital, le président de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) est appelé à l’aide. « Samuel Eto’o a intervenu et a même accepté de payer son billet d’avion, poursuit notre source. M. Zhakata devait alors quitter le Cameroun le 2 février. Mais une fois à l’aéroport, le chef d’escale a fait savoir qu’il fallait avant toute chose solder une pénalité d’un montant de 254 000 francs CFA (387 euros). N’ayant pas les fonds, M. Zhakata va retourner à l’hôtel ».
Depuis, les factures en termes d’hébergement et de nutrition se sont accumulées. Alvin Zhakata traine une ardoise d’un peu plus d’un million (1500 euros) à l’hôtel Arenah. Et il doit en plus payer de nouvelles pénalités pour son billet d’avion. Soit 310 000 francs CFA (472 euros). Sa famille qu’il a régulièrement via le réseau social WhatsApp n’a pas encore pu collecter les fonds nécessaires. Etant entendu que le Zimbabwe n’a pas de représentation diplomatique au Cameroun, toutes les sollicitations adressées au ministère zimbabwéen des sports sont restées lettre morte. Alvin Zhakata est seul à Yaoundé face à son destin…
Kigoum WANDJI