L’athlétisme au Sénégal a perdu de sa superbe depuis les années 2000. L’héritage de El Hadji Amadou Dia Ba, vice-champion olympique sur 400m haies aux Jeux olympiques de Séoul en 1988 et d’Amy Mbacké Thiam, championne du monde du 400m aux Mondiaux d’Edmonton en 2001, n’a pas été perpétué par les générations 2000. Depuis plus d’une décennie, le drapeau du Sénégal flotte sur les pistes des JO grâce aux Wildcards distribués par l’IAAF sur recommandation du CIO. Une donne qui pourrait évoluer positivement grâce à trois nouveaux porte-étendards de l’athlétisme sénégalais avec le hurdler Louis-François Mendy, la triple sauteuse Saly Sarr et le coureur de 400m, Cheikh Tidiane Diouf.
Louis-François Mendy, l’espoir des haies
Grand espoir du 110m haies sénégalais, Louis-François Mendy confirme tout son potentiel ces derniers mois dans l’athltisme. À 24 ans, Mendy poursuit sa carrière en France, au grand bonheur de son entraîneur, Alain Smail. «C’est un garçon que j’entraîne depuis 4 ans. Il est en constante progression, juge-il. À sa première sortie, il réalise un record national en 13 secondes 48. Ce qui représente le niveau international B. C’est un garçon qui a un fort potentiel. On a beaucoup amélioré sa vitesse de base cette année. Il égale les meilleurs sprinteurs actuels. Sa marge de progression est encore énorme. Cette année et en 2024, il va nous montrer toutes ses qualités», espère le technicien français, interrogé par Sport News Africa.
Ces dernières années, Louis-François Mendy enchaîne les performances avec la médaille de bronze au Maroc lors des jeux Africains 2019 et l’argent aux Jeux de la solidarité islamique en août 2022 en Turquie. Il améliore constamment ses meilleures marques lors de rendez-vous hexagonaux d’athlétisme. En 2021, il découvre les hautes exigences du niveau international lors des JO de Tokyo. Depuis lors, Louis-François Mendy peine énormément à se frotter plus souvent aux meilleurs hurdlers du globe. Une donne qui pourrait changer puisque Louis-François Mendy fait partie des 18 sportifs sénégalais bénéficiant de la bourse olympique octroyée par le CNOSS.
Un soutien de taille pour permettre à son entraîneur de l’aider à gagner encore quelques centièmes. «L’amélioration possible à son niveau est sur le premier parcours. Il a encore quelques difficultés sur les 5 premières haies. Il est très bien ensuite sur les haies 6, 7, 8, 9 et 10. On travaille dessus. L’autre aspect c’est d’être confronté à des concurrents de très haut niveau, donc chercher des compétitions de très haut niveau. Qu’il puisse courir avec des athlètes qui sont au niveau mondial. Cette année on aura des meetings où il sera confronté aux meilleurs français, qui ont quand même un très bon niveau. Nous verrons ensuite les différents éléments encore à perfectionner», a déclaré M. Smail.
Saly Sarr, le talent dans la polyvalence
Médaillée d’argent du triple saut aux Championnats d’Afrique d’athlétisme 2022 en Île Maurice, Saly Sarr est une des plus belles promesses de l’athlétisme féminin sénégalais. «Saly a un potentiel énorme. C’est une sprinteuse, une redoutable hurdleuse qui a réalisé récemment 14’’82 sur 100m haies (championnats interclubs 2023). Elle arrive à franchir 1m60 à la hauteur. Elle a établi son record au triple saut de 13m06 dans la souffrance, à cause d’une blessure deux jours avant aux championnats d’Afrique. Ça prouve l’immense potentiel de Saly», a analysé Coach Amadème, son premier entraîneur.
À seulement 20 ans, Saly Sarr peut se frotter aux meilleures ahlètes mondiales, «si elle est mise dans des conditions optimales ». Au centre africain d’athlétisme de Dakar, elle n’a pas vraiment un entraîneur spécialiste des sauts. «On s’occupe bien d’elle au niveau de la musculation, du renforcement et elle a gagné en pointe de vitesse. Malheureusement sur le plan de la technique, il y a encore des lacunes. Elle s’est d’ailleurs blessée aux Interclubs. Le triple saut ne pardonne pas à ce niveau. Il lui faut un spécialiste pour l’aider sur ces lacunes techniques. Elle a aussi besoin d’une stabilité sociale. Je sais qu’elle a plus de 14m dans les jambes», suggère son coach.
Malgré son jeune âge, Saly Sarr a déjà montré qu’elle a en effet un niveau international. En juin 2022, après son titre de vice-championne d’Afrique, elle a remporté la médaille d’or de l’Open de France avec un bond mesuré à 13m75. Un an plus tôt, alors âgée de 18 ans, elle se hisse en finale des Championnats du monde d’athlétisme U20 au Kenya. Championne d’Afrique U18 à l’heptathlon grâce à sa polyvalence, elle pourrait avec un plan de développement taillé sur mesure pour elle, briller dans cette discipline sur le plan africain et mondial.
Cheikh Tidiane Diouf, le diamant du tour de piste
Footballeur à ses débuts, notamment dans les Navétanes (championnat populaire de quartiers) dans son village natal de Touly, Cheikh Tidiane Diouf chausse ses premières pointes sur le tard. C’est à travers l’UASSU (championnat scolaire) qu’il découvre ainsi peu à peu. En 2016 et 2017, il remporte les épreuves du triple saut et du 100m. Ce n’est que bien plus tard, après son bac qu’il est convaincu par son grand frère de faire le concours d’éducateur physique à l’INSEPS. Durant les épreuves physiques de ce concours, il claque un chrono de 51 secondes sur 400m avec des claquettes. Il est invité dans la foulée par le Directeur technique national à démarrer une carrière dans l’atlétisme.
Réticent au début, il est à deux doigts d’abandonner. Il change d’avis dès sa première compétition internationale aux Jeux universitaires en 2018. Il atteint la finale du 400m et remporte la médaille d’or au relais 4x400m. Depuis, il n’arrête pas d’affoler les chronos nationaux. De 46’’13, il passe à 45’’62 au meeting de Belgique en 2022. De quoi aiguiser notamment son appétit. Pour cette année 2023, Cheikh Tidiane Diouf vise une médaille aux Jeux de la Francophonie en RDC (28 juillet – 6 août). L’athlète de 28 ans a déjà réalisé les minimas. Il espère également faire les minimas pour disputer du 19 au 27 août, ses premiers Championnats du monde à Budapest, la capitale hongroise.
Cheikh Tidiane Diouf s’est fixé quelques défis de taille. Battre le vieux record du Sénégal sur 400m (1968) est dans un coin de sa tête. Mais pas que. «Je rêve de découvrir les Jeux Olympiques. Je peux décrocher la qualification pour Paris 2024 mais ce sera pour apprendre. Par contre en 2028, l’ambition est de décrocher une médaille», a-t-il confié au micro de Sport News Africa. Avec un chrono personnel à 45’’56, il devra gagner une demie seconde d’ici 14 mois pour se rapprocher des minimas aux JO : 45’’00.
Moustapha M. SADIO