Les joueurs djiboutiens et sud-soudanais vont ouvrir tout grand leurs yeux mercredi, au moment où ils fouleront la pelouse de l’immense stade de Borg El Arab, près d’Alexandrie. Les 86 000 places de cet imposant vaisseau ne seront probablement pas toutes occupées, mais peu importe : les internationaux de ces deux sélections parmi les plus modestes d’Afrique n’ont pas vraiment l’habitude d’évoluer dans un stade de cette taille, même si, au fond d’eux, ils auraient préféré jouer à Djibouti d’abord, à Juba le 27 mars, plutôt qu’en Egypte et à Kampala, en Ouganda. Mais la Confédération Africaine de Football (CAF) n’avait pas d’autre choix que de délocaliser les deux rencontres, puisque le stade El Hadj Hassan Gouled Aptidon de Djibouti n’est plus aux normes internationales et celui de Juba (35 000 places) est encore en construction.
Cusin : «Ça sera équilibré»
Entre Djibouti (192e au classement FIFA) et le Soudan du Sud (168e), les débats s’annoncent équilibrés. « Ce sont deux équipes proches l’une de l’autre cela se jouera à peu de choses, ça sera équilibré. Djibouti a progressé ces dernières années, en atteignant le deuxième tour des qualifications pour la Coupe du Monde. En ce qui nous concerne, on espère se qualifier, afin de pouvoir nous mesurer à des équipes d’un niveau supérieur dans la phase de groupes. Mais le président de la fédération (Agostino Maduot Parek), s’il souhaite évidemment qu’on élimine Djibouti, s’est montré clair : même si nous sommes éliminés, cela ne changera rien. Quand j’ai signé en septembre dernier, pour deux ans, il m’a dit qu’il fallait d’abord construire, et ensuite avoir des résultats la seconde année, en 2023 », explique Stefano Cusin (54 ans), nommé sélectionneur des Bright Stars en septembre dernier.
Le technicien italien, né au Canada et qui a grandi puis joué en France, dirige pour la première fois une sélection nationale, après avoir entraîné des clubs en Europe (Italie, Bulgarie, Chypre), en Asie (Iran, Palestine, Emirats Arabes Unis) et en Afrique (Al-Ittihad Tripoli en Libye et Black Leopards en Afrique du Sud). « Il y a un projet sportif intéressant au Soudan du Sud. Ces dernières années, la sélection a obtenu quelques résultats intéressants, notamment une victoire face à l’Ouganda (1-0) en qualifications pour la CAN 2021, ou un nul en octobre dernier en amical contre la Sierra Leone (1-1) au Maroc. Le Soudan du Sud a aussi accroché la Gambie (1-2) en faisant un bon match », récite Cusin, qui a pu organiser en janvier dernier un stage à Dubai (Emirats Arabes Unis), ponctué de deux matches amicaux face à l’Ouzbékistan (0-3) et la Jordanie (1-2). Stefano Cusin a reçu certaines assurances de la part de sa fédération, comme celles de disputer des matches amicaux régulièrement lors des dates FIFA, ou d’organiser des stages, avec la sélection A ou A’, dont il est également en charge.
Une importante diaspora
Contrairement à Djibouti, qui mise presque exclusivement sur des joueurs locaux, le Soudan du Sud s’appuie surtout sur des expatriés, éparpillés entre des pays africains (Kenya, Soudan, Ouganda), asiatiques (Iran), en Australie ou en Lituanie. « J’ai quelques joueurs locaux qui évoluent dans les meilleurs clubs du pays, mais le championnat du Soudan du Sud n’est pas encore d’un niveau très relevé. Nous avons certes besoin de faire progresser les joueurs locaux, mais aussi de s’appuyer sur ceux qui évoluent dans des ligues étrangères d’un niveau supérieur. C’est pour cela qu’il est important que je sois à Juba pour voir des matches, rencontrer les entraîneurs pour leur expliquer ma façon de travailler, organiser des stages… »
Stefano Cusin a également activé ses réseaux pour dénicher des joueurs ayant des origines sud-soudanaises, susceptibles de renforcer les Bright Stars. Une démarche qui a déjà porté ses fruits, avec l’arrivée au sein de la sélection de William Akio, l’attaquant de Valour FC (Canada), Machop Chol (Atlanta United, Etats-Unis), Kur Gai ou valentino Yuel, qui évoluent respectivement à Adelaïde City et Newcastle Jets (Australie). Des joueurs que Cusin et la fédération ont su convaincre, en insistant sur l’amélioration des conditions de travail de la sélection. « Cela va prendre du temps, nous sommes en train de construire, mais il y a un potentiel intéressant à exploiter », conclut le sélectionneur.
Alexis BILLEBAULT